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4 milliards d’euros dans la rue


Invité salimdz

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LES ÉMIGRÉS ET LE CHANGE PARALLÈLE EN KABYLIE

4 milliards d’euros dans la rue

10 Juillet 2008 - Page : 6

 

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La Kabylie détient la plus grande partie des transferts d’argent de l’émigration. Se chiffrant à des milliards d’euros, cette manne est absorbée par le marché informel au lieu de participer au développement de la région.

Une étude Femip (Facilité euro-méditerranéenne d’investissement et de partenariat) réalisée par la Banque européenne d’investissement, a conclu qu’entre 12,4 et 13,6 milliards d’euros sont transférés annuellement vers les pays du Maghreb. La communauté maghrébine résidant en France est la principale si ce n’est l’unique origine de ces fonds qui atterrissent pour une petite partie dans les banques et pour une grande dans les filets d’un gigantesque marché informel. 50% c’est-à-dire quelque 6,5 milliards transitent par le marché informel et donc autant d’argent qui échappe au contrôle des banques. Sur les places publiques où se tiennent les marchés informels, le commerce est plus grand qu’il n’y paraît. Certains «vendeurs d’euros» révéleront que plus de deux milliards d’euros traversent quotidiennement ce canal informel très juteux pour certains mais, calamiteux pour l’économie nationale.

 

Un projet intitulé Mirem (action collective de soutien à la réintégration des migrants de retour dans leur pays d’origine) effectué en 2005, peut être un éclairage sur la meilleure manière d’aborder cette problématique. Financé par l’Union européenne et l’Institut universitaire européen, ce projet tente de trouver le lien qui existe entre le retour des émigrés et le développement dans les pays d’origine. En effet, le transfert informel d’argent et la constitution d’une véritable activité boursière parallèle ne doivent pas être abordés exclusivement comme des actions subversives. Plusieurs étapes s’avèrent indispensables pour bien comprendre le fonctionnement de ce phénomène. Il convient d’abord d’aller aux origines et aux sources de ces fonds qui alimentent ce marché. Puis, il serait judicieux de suivre les canaux par lesquels parvient dans notre pays cette manne financière. Et enfin, il devient plus facile de comprendre le sort réservé à cette véritable richesse qui s’en va hélas, à vau-l’eau.

 

Selon un rapport commandé par Nicolas Sarkozy en 2002, alors ministre de l’Intérieur, la communauté algérienne occupait la première place en matière de transfert de fonds en direction de son pays avec plus de 3,15 milliards d’euros. Ces chiffres en fait sont minimes par rapport aux sommes faramineuses qui transitent par le marché informel. Le Maroc vient en deuxième position, suivi par la Tunisie. Contrairement à l’Algérie, ces deux derniers pays ont tenté de canaliser cette manne financière et la mettre au profit de leur développement local. Notre pays a laissé ces fonds s’évaporer...Les spécialistes qui ont contribué à l’élaboration du Mirem, s’interrogeaient en fait sur les meilleurs moyens pouvant canaliser ces devises et les injecter dans le secteur économique.

 

Aux origines de cette manne financière

L’importance de la communauté algérienne en France détermine l’immense réserve financière transférée par les deux canaux, formel et informel. Commençant à s’y installer depuis le début du siècle dernier, celle-ci est essentiellement kabyle. Selon les chiffres obtenus, les rentrées en devises de la région de Kabylie dépassent celles du tourisme au Maroc. Constituée essentiellement des retraites des travailleurs qui ont passé des décennies dans l’Hexagone, cette manne est concentrée dans les banques françaises. Ce n’est que récemment que la Banque du développement rural (Badr), a signé une convention avec les Caisses françaises d’assurance pour le transfert vers l’Algérie. En plus de cette première génération de travailleurs qui, habituellement, envoient cet argent pour subvenir à leurs familles restées dans le pays, sont venues s’ajouter les deuxième et troisième générations composées de leurs enfants venus s’installer après la loi sur les regroupements familiaux de la fin des années 70. Celles-ci, ayant obtenu des statuts professionnels plus hauts donc plus profitables, sont restées attachées à leur pays d’origine bien que leur intégration dans la société européenne est plus étendue. La Kabylie qui devait être une région très riche, par cet apport de ses enfants, est restée l’une des plus pauvres du pays. Pourtant, on a pour exemple l’expérience de plusieurs pays comme l’Espagne et le Portugal, qui ont su amorcer un développement basé sur l’apport de leurs émigrés. L’inefficacité des canaux formels est à l’origine de l’émergence de nombreux canaux informels. Pour vérifier ce fait, nous nous sommes rendus dans les lieux où se déroulent les transactions parallèles. Le citoyen ordinaire de la wilaya de Tizi Ouzou, questionné, indique le lieu où se tient ce marché financier parallèle à quelques mètres de la Banque de développement rural, en charge du transfert des virements de retraites d’émigrés. Sur les lieux, les discussions avec les vendeurs et les acheteurs expliquent en grande partie le phénomène. Aussi étonnant que cela puisse paraître, les vendeurs, essentiellement retraités, les préfèrent à la banque. Un jeune vendeur, questionné, nous dira qu’il se vend, dans ce lieu, presque cinq cent mille euros (500.000 euros) quotidiennement. Juste à quelques mètres de nous, un vieil homme nous invite à nous asseoir à sa table. D’un air déçu, il nous révélera qu’il avait ouvert un compte courant dans la banque à côté mais, qu’il a dû le fermer. La raison, selon lui, réside dans les pratiques bureaucratiques de celle-ci. Ces jeunes acheteurs, dans ce café, «sont plus crédibles et plus fiables que la banque», dira-t-il avant d’ajouter, sur un air courroucé, qu’il ne pouvait pas retirer son argent quand il le désirait avec le montant voulu. «Ces banquiers disposent de notre argent comme ils veulent», nous dira un autre vieil homme qui raconte qu’il s’est fait voler à l’intérieur même d’une banque. «C’est ici dans ce café que je me sens en sécurité», criera un autre vieux assis à une autre table. C’est donc un vrai marché qui se tient à quelques mètres d’une banque qui a en charge les pensions des émigrés. Questionnés sur ce qu’ils font de l’argent liquide qu’ils achètent, ces citoyens nous indiqueront un autre marché qui se tient en plein centre de la capitale, Alger.

 

2 milliards d’euros dans un square

Au square, au bout de la rue Larbi Ben M’hidi, un vendeur nous dira que plus de deux milliards d’euros transitent chaque jour. Les petits acheteurs des cafés de la ville de Tizi Ouzou viennent ici vendre à des acheteurs plus grands. Certains nous révéleront que toute cette manne financière traverse les frontières et s’évapore par des virements Swift. Un autre nous dira que Dubaï, la Chine, et la Turquie sont les plus importantes destinations de cet argent. Toutes les banques que nous avons contactées s’accordaient sur le contrôle rigoureux de l’origine des fonds dans notre pays, contrairement à ces derniers. Cependant, si l’origine des fonds n’est pas le premier souci des banques de ces pays, le problème en Algérie s’avère être le contrôle aux frontières. Parallèlement, il existe également une formule qui empêche cette manne de parvenir en Algérie. En effet, une grande partie des retraités et autres détenteurs de comptes en France, échangent leur argent par des canaux informels. Recevant l’équivalent en dinars du montant de leur chèque, ils procèdent à un virement à partir de leur banque en France vers un compte appartenant à un vendeur y résidant.

 

Une fois retiré en France, cet argent fuit les canaux officiels et rejoint le marché informel. Certains témoignages que nous avons déjà cités, renseignent suffisamment sur, d’abord, le manque d’intérêt pour cette ressource puis, par voie de fait, l’inefficacité du système bancaire algérien et le manque de confiance qu’il inspire. Tandis que les pays voisins et surtout le Maroc, ont élaboré des stratégies d’orientation de cette manne financière qui se compte par des milliards d’euros dans l’activité économique, la politique de notre pays s’appuyait exclusivement sur la rente pétrolière. Le gouvernement marocain s’est doté d’un ministère chargé de la diaspora marocaine à l’étranger et a créé la banque Accord, filiale du groupe français de distribution Auchan, spécialisée dans les cartes de retrait d’argent. Pour aider à l’affectation de ces fonds dans les créneaux de développement, ces mêmes structures ont créé des centres régionaux d’investissement. Selon un rapport du Centre de prospective économique du monde méditerranéen, les fonds des émigrés marocains sont à plus de 50% des ressources d’exportation et dépassent les rentrées du secteur du tourisme. D’autres pays ont également compris l’importance de ces rentrées, mais ce n’est cependant pas toutes les expériences qui ont réussi. En 1976, la Turquie a créé une banque nommée Desiyab, la Syrie, de son côté, le Expatriate Fund. En plus de ces causes liées à la vision générale de l’Etat en matière de fonds d’émigrés et l’incompatibilité avérée du système bancaire, d’autres facteurs viennent se greffer pour en faire un véritable blocage. Ces dernières années, plusieurs dispositifs de création d’entreprises ont été mis en place par l’Etat algérien. Ces derniers qui offraient la possibilité de financement bancaire et l’autofinancement pouvaient être de véritables réceptacles pour cette manne. Ils pouvaient canaliser ces fonds dans de nombreux secteurs. Mais il n’en était rien. La culture de l’investissement n’est pas encore au rendez-vous. La région de Kabylie qui accueillait la plus grande partie de ces rentrées, demeure pauvre alors qu’elle rivalise avec le Maroc sinon le dépasse en la matière. Actuellement, toute cette manne alimente le marché automobile dans l’Hexagone et fait grossir le parc national et régional. Cette rente a créé une véritable tendance à l’économie de consommation et point à celle de production.

 

Les paradis fiscaux et les pratiques déloyales de convoitise de certains pays qui ferment les yeux sur l’origine des fonds, ne peuvent pas être combattus, affirment les spécialistes des finances. Les ripostes doivent émaner des pays victimes. Les sociétés consommatrices sont les proies privilégiées de ces réseaux. L’Etat devra créer les structures nécessaires pour faciliter les transferts ainsi que leur réorientation vers les différents créneaux d’investissement. Le système bancaire est appelé à s’adapter aux donnes financières internationales pour que ces paradis fiscaux ne profitent pas de cette importante manne financière qui gonfle le marché informel.

 

source : http://www.lexpressiondz.com/article/2/2008-07-10/54301.html

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